71 LE PATRIMOINE CULTUREL NUMÉRIQUE
DESPRÉS-LONNET M. – 71-88 – 2e SEM. 2013
C U L T U R E & M U S É E S N ° 2 2 MARIE DESPRÉS-LONNET
LE PATRIMOINE CULTUREL NUMÉRIQUE : ENTRE COMPILATION ET COMPUTATION
L’ objectif de cet article est de fournir un éclairage propre à mieux appréhender «l’interstice, immense, entre le traitement technique des objets et leur qualifi cation culturelle » (Jeanneret, 2000). La réfl exion sera menée sur la base d’une étude du portail Europeana et permettra de revenir sur les différentes étapes par lesquelles un objet de patrimoine, détenu par un des organismes chargés de sa conservation et de sa mise en valeur, se transforme en l’un des millions d’items consultables via ce portail. Nous détaillerons pour cela les démarches et opérations d’inventaire et de numérisation menées au sein de différents organismes culturels européens qui participent à ce vaste projet politique afi n de montrer sous quelles formes les objets qu’ils détiennent sont mobilisés pour construire des représentations censées donner à voir quelque chose du «patrimoine culturel européen » .
De l’objet à la référence
L e comité des Sages, à qui la Commission européenne avait demandé de mener une réfl exion sur la numérisation du patrimoine culturel européen, suggère, parmi ses recommandations, que le portail Europeana devienne la référence première pour le patrimoine culturel européen en ligne : «Les États membres doivent garantir que tout le matériel numérisé grâce à des fonds publics est accessible sur ce site et mettre tous leurs chefs-d’oeuvre du domaine public sur Europeana d’ici à 2016 1 » . Cependant, de nombreuses ambiguïtés terminologiques dans la présentation du projet tendent à masquer derrière des expressions aussi génériques que «patrimoine culturel » , «accessible » ou encore «mettre sur Europeana » , des contextes, des pratiques, des objets